Description
Rarement un pape aura été aussi prolifique. En publiant, le 10 mars, le deuxième tome de son travail sur Jésus, Benoît XVI multiplie les événements éditoriaux “en sortie mondiale”. Quelques mois après la parution de son livre d’entretiens, Lumière du monde (Bayard, 2010), qui s’est vendu en France à 80 000 exemplaires, le pape sort des sentiers empruntés par ses prédécesseurs (encycliques à l’abord ardu, exhortations apostoliques, catéchèses romaines…) pour affirmer que son élection à la tête de l’Église catholique, il y a bientôt six ans, ne l’a pas empêché de continuer à mener ses recherches de théologien. Il a achevé son ouvrage le 25 avril 2010, en pleine tourmente liée aux affaires de pédophilie dans l’Église.
Il livre donc ici le deuxième tome d’une trilogie, dont la première partie, parue en 2007, abordait la vie de Jésus, de son baptême à la transfiguration. Cette fois, l’ouvrage s’intéresse aux principaux points de la foi chrétienne, “la Passion, la mort et la Résurrection de Jésus”, et invite son lectorat à une catéchèse érudite. “Je n’ai pas voulu écrire une “Vie de Jésus””, précise le pape, qui pose comme acquise l’idée selon laquelle “en deux cents ans de travail exégétique, l’interprétation historico-critique a désormais donné tout ce qu’elle avait d’essentiel à donner”.
Sans rejeter ce travail scientifique, Benoît XVI s’attache à faire découvrir ce qu’il appelle le “Jésus réel”, – celui que “connaissent” les croyants à travers leur foi -, en complément du “Jésus historique”. Cette dernière approche, largement traitée par des auteurs de tous horizons, est “insuffisante” à rendre compte de la capacité de Jésus à “dépasser les expériences communes de l’humanité”, ainsi que l’explique Mgr Eric de Moulins-Beaufort, chargé par l’Église catholique de France de décrypter l’ouvrage du pape.
Benoît XVI, dans son avant-propos, assure avoir entendu les critiques émises sur le premier tome, jugé trop abstrait et théologique : “J’ai essayé de réfléchir seulement sur les paroles et les actes essentiels de Jésus – guidé par l’herméneutique de la foi, mais en tenant compte en même temps et de manière responsable de la raison historique contenue dans cette même foi.”
Dans un récit chronologique et narratif, le pape s’appuie naturellement sur les quatre évangiles, mais puise aussi dans l’Ancien Testament pour dérouler son exégèse et aborder à nouveau des notions telles que le rapport du christianisme à l’universel, à la violence ou à l’Etat. Il reprend en outre des enseignements popularisés depuis le concile Vatican II (1962-1965). Ainsi, son rejet réaffirmé de la notion de “peuple déicide”, accolé au peuple juif dans son ensemble, a valu à Benoît XVI les “félicitations” du premier ministre israélien et du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF)…
L’ouvrage, à la lecture plus aisée qu’un manuel de théologie, ne recèle ni révélation ni règlements de comptes frontal. Avec des références “un peu datées”, selon Mgr de Moulins-Beaufort, Benoît XVI poursuit, à sa manière, son travail sur l’articulation entre la foi et la raison. En outre, quoiqu’il signe l’ouvrage “Joseph Ratzinger-Benoît XVI”, l’auteur ne se pose pas en pape livrant “le magistère de l’Église”.
Mais il est clair que sa position donnera à son analyse un écho supérieur à celui de n’importe lequel des théologiens contemporains. Un écho que le pape souhaite amplifier en répondant, pour la première fois, le 22 avril, jour du vendredi saint, à des questions sur Jésus au cours d’une émission retransmise sur la chaîne publique italienne RAI Uno.
JÉSUS DE NAZARETH. DE L’ENTRÉE À JÉRUSALEM À LA RÉSURRECTION de Joseph Ratzinger-Benoît XVI. Ed. du Rocher, 350 p.,
Source: lemonde.fr
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